Les questions abordées ici par les notions de champ ouvert et de plein air croisent d'emblée celles de champ expérimental et d'espaces d'activités et de travail, ces dernières étant encore à explorer et à interroger. Si l'art est un « travail » continu et désintéressé (c'est-à-dire non utilitaire), et qui s'oublie comme travail et labeur, il est aussi très résistant à ses confinations : il couvre et se fonde sur des manières d'occuper le temps et l'espace « hors-limites ».
Aller dans le plein air, en art, est d'une certaine manière, « passer dans le décor » ou « s'envoyer, aller, partir ou rentrer dans le décor », comme « entrer dans le vif ». Cela a sans doute toujours été le cas, même si sont repérées historiquement certaines décisions, régimes et hypothèses, bornant ainsi ce qui peut apparaître comme des marges de manœuvre : le pleinairisme, le land art, l'art contextuel, etc. pour ne citer que les plus communes. Aller dehors, croiser les flux, le fortuit, leurs dimensions et durées, requiert sans doute des conditions, à placer hors hermétismes, spécialismes et solipsismes, et hors « tourisme » ; ces conditions demandent de créer des écarts, des marges, des ralentissements, des délais, des improvisations et des désynchronisations, justement, par rapport à ces flux, ces consensus et normes. Sans doute que par là, c'est le sens de l'atelier (comme champ ouvert, processuel, justement « en plein air »), « l'atelier d'artiste », qui devient central, sans qu'il « se gazéifie », s'indifférencie, se neutralise ou s'évapore, ou encore sans qu'il soit nécessaire de définir un « art du dehors » ou un « art social » (auxquels je ne crois pas), ou, encore, sans avoir à évoquer une rupture ou une disparition (de l'art). (Jérôme Joy)